La région afrotropicale peut être divisée en quatre zones ou sous-régions :
Afrique orientale : Soudan – Ethiopie – Yemen – Socotra – Somalie – Kenya – Ouganda – Tanzanie.
Afrique australe : Mozambique – Malawi – Zambie – Zimbabwe – Botswana – Namibie – Afrique du Sud.
Afrique centrale : Angola – RDC Zaïre – RPC Congo – Rwanda – Burundi – Gabon – Guinée équatoriale – Sao Tomé – Centrafrique (RCA) – Cameroun.
Afrique occidentale : Sénégal – Gambie – Guinée Bissao – Guinée – Sierra Leone – Libéria – Burkina Faso – Ghana – Côte d’Ivoire – Togo – Bénin – Nigéria – Tchad – Mali.
Les sous-régions
1- Sous-région occidentale
Cette sous-région héberge 11 genres et 30 espèces, soit 33% des genres et 15% des espèces afrotropicaux. Sur les 30 espèces, 18 sont endémiques à la sous-région et 12 sont communes avec la sous-région centrale. La sous-région ne comprend qu’un seul genre endémique : Epipholis (Diplotaxini) avec une espèce de Côte d’Ivoire. Le Sénégal (7 espèces), la Guinée (9 espèces), le Togo (8 espèces) et la Côte d’ivoire (11 espèces) sont les pays les plus riches et aussi les mieux prospectés. La richesse en espèces du Togo vient principalement du fait des récoltes allemandes lors de la période coloniale.
2- Sous-région centrale
Cette sous-région héberge 19 genres et 80 espèces, soit 58% des genres et 40% des espèces afrotropicaux. Sur les 80 espèces, 61 sont endémiques (76%) à la sous-région, 6 sont communes avec la sous-région orientale, 1 est commune avec la sous-région australe et 12 sont communes avec la sous-région occcidentale. Six genres sont endémiques : Comatapogonia (Diplotaxini, 1 espèce), Eupegylis (Pegylini, 1 espèce), Camerunopholis (Leucopholini, 1 espèce du Cameroun), Eulepidopsis (Leucopholini, 1 espèce de RDC), Pseudopholis (Leucopholini, 2 espèces) et Hoplosternodes (Melolonthini, 1 espèce de RDC). Le Cameroun (24 espèces), le Gabon (15 espèces), la RPC Brazzaville (17 espèces) et surtout la RDC Zaïre (52 espèces) sont les pays les plus riches en espèces. La richesse en espèces du Cameroun vient principalement du fait des récoltes allemandes lors de la période coloniale. La RDC a fait l’objet de nombreuses récoltes lors de la période coloniale belge et bien étudiée par la suite par les auteurs belges comme Burgeon et Decelle. Sa richesse s’explique aussi par la taille du pays et par la diversité de ses biotopes.
3- Sous-région australe
Cette sous-région héberge 11 genres et 36 espèces, soit 33% des genres et 18% des espèces afrotropicaux. Sur les 36 espèces présentes, 34 sont endémiques à la sous-région et deux sont communes avec la sous-région centrale. La sous-région comprend deux genres endémiques : Rhabdopholis (Leucopholini, 4 espèces d’Afrique du Sud et Mozambique) ; Stenopegylis (Pegylini, 1 espèce du Malawi). Le Zimbabwe (14 espèces), l’Afrique du Sud (15 espèces) et le Mozambique (10 espèces) sont les pays les plus riches en espèces. L’Afrique du Sud et le Zimbabwe ont été bien étudiés principalement par Péringuey qui en a fait la synthèse de leur faune. La Namibie et le Botswana, riches en Pachydeminae (30 et 13 espèces respectivement) s’avèrent pauvres en Melolonthinae (si l’on excepte les Schizonychini).
4- Sous-région orientale
Cette sous-région héberge 19 genres et 75 espèces, soit 58% des genres et 38% des espèces afrotropicaux. Sur les 75 espèces présentes, 69 sont endémiques à la sous-région et 6 sont communes avec la sous-région centrale. Toutes les tribus sont représentées. La tribu des Pegylini est bien représentée avec 22 espèces sur les 37 du genre (59%). C’est la sous-région qui comprend le plus de genres endémiques (8) : Tanzanipholis (Diplotaxini, 1 espèce de Tanzanie), Brachylepis (Leucopholini, 2 espèces), Cochliotis (Leucopholini, 3 espèces), Lepidomela (Leucopholini, 2 espèces), Tanzanilepis (Leucopholini, 1 espèce), Kenyalepis (Leucopholini, 1 espèce), Cochliotodes (Melolonthini, 1 espèce du Kenya), Engistanoxia (Melolonthini, 1 espèce du Kenya) et Aethiaratrogus (Rhizotrogini, 3 espèces d’Ethiopie et du Yemen). La Tanzanie avec 44 espèces et le Kenya avec 28 espèces sont les deux pays les plus riches. Cela s’explique par la diversité de leurs biotopes et aussi par un nombre de récolteurs plus important. L’Ethiopie, avec 15 espèces, s’avère riche en Diplotaxini (7 espèces) et Pegylini (5 espèces).
Composantes de la faune afrotropicale
La région afrotropicale présente une assez riche diversité en Melolonthinae. Toutes les tribus sont représentées à l’exception des Enariini (malgaches) et des Heptophyllini (paléo-orientaux). La tribu la mieux représentée est celle des Schizonychini avec 39 genres et 466 espèces (86 % des genres et 87 % des espèces au niveau mondial). Le seul genre Schizonycha représente à lui seul 349 espèces. La tribu des Pegylini est endémique à la région avec 4 genres et 37 espèces, surtout présentes en Afrique orientale. La tribu des Leucopholini est assez bien représentée avec 15 genres et 64 espèces (41 % des genres et 15 % des espèces au niveau mondial ; 58 % des espèces se trouvant en région orientale). La tribu des Melolonthini est pauvrement représentée avec 4 genres et 6 espèces (7 % des genres et 1,5 % des espèces au niveau mondial). La tribu des Rhizotrogini en est pratiquement absente avec 2 genres et 6 espèces (3 % des genres et 0,3 % des espèces au niveau mondial). La tribu des Diplotaxini est bien diversifiée pour les genres (9) et un peu moins pour le nombre d’espèces (88) (53 % des genres et 13 % des espèces au niveau mondial).
Avec un total de 667 espèces, la région afrotropicale se place en quatrième position sur six après la région néarctique-néotropicale (1085 espèces), la région paléarctique (998 espèces) et la région orientale (961 espèces). Il est à noter que la région malgache avec 48 genres et 258 espèces sur une superficie bien moindre présente un taux de diversité bien plus élevé (Lacroix, 1989, 1993).
La région afrotropicale présente une assez riche diversité générique avec 73 genres sur 274 genres mondiaux (41 % du niveau mondial). Par contre, la richesse en espèces, comme nous l’avons vu plus haut, est moindre malgré l’apport important au niveau des Schizonychini qui occupent dans cette région le plus grand nombre de niches écologiques et de biotopes.
Sur 667 espèces répertoriées en région afrotropicale, les Schizonychini représentent 70 % du nombre total des espèces et les Diplotaxini viennent en deuxième position avec 13 % de ce nombre total. Cela laisse évidemment peu de place pour les autres tribus (17% dont 9 % pour les Leucopholini et 6 % pour les Pegylini).
Les Melolonthinae afrotropicaux sont plus nombreux en région de forêt pluviale (rain forest) ou les chutes de pluie annuelles dépassent 1500 mm (de la Guinée à la RDC). Ils sont ensuite bien représentés dans la zone de savane humide (800 à 1500 mm de pluviosité annuelle) qui se situe entre les deux tropiques. Ils sont très peu présents dans les régions semi-désertiques (Sahel, sud-ouest africain, corne de l’Afrique). Il est à noter qu’ils sont assez présents dans les régions assez sèches de l’Est africain (nord du Kenya, Ethiopie et Somalie) et pratiquement absents du sud-ouest africain (Namibie, Botswana). La région du Sahel est pauvre avec 2 espèces au Burkina Faso et 3 espèces au Tchad.
L’altitude est aussi un facteur de biodiversité, les espèces étant plus nombreuses entre 0 et 700 mètres, plus rares entre 700 et 1300 mètres et pratiquement absentes au dessus.
Les facteurs physiques comme la pluviométrie, l’altitude, la température annuelle et les régimes climatiques influencent la distribution des Melolonthinae en sachant que le meilleur rapport est une pluviométrie élevée avec une altitude faible et une température moyenne (23-27 °C) ce qui correspond aux régions tropicales humides.
Les deux grands centres de diversité sont la région du Congo (RDC avec 52 espèces ; Cameroun : 24 espèces ; Gabon : 16 espèces ; RPC Brazzaville : 17 espèces) et la région à l’est des grands lacs (Tanzanie : 44 espèces ; Kenya : 28 espèces ; Ethiopie : 15 espèces).
La plus grande pauvreté en espèces de Melolonthinae de la région afrotropicale par rapport aux régions paléarctique ou orientale peut s’expliquer par une moins grande diversité dans les biotopes, une plus grande uniformité des espaces, moins de niches disponibles comme dans les îles de la région orientale, une plus grande facilité de brassage génétique.
Les Diplotaxini, avec 9 genres et 88 espèces, sont surtout représentés par le genre Apogonia (57 espèces) à répartition dans toute la région afrotropicale. Le genre est même présent dans le sud-ouest africain (Namibie, Botswana). Le genre Comatapogonia est un endémique d’Afrique centrale. Le genre Metapogonia (10 espèces) est présent dans l’Est africain (Une espèce incertaine au Sénégal). Deux genres sont monospécifiques : Epipholis de Côte d’Ivoire et Tanzanipholis de Tanzanie. Les deux genres Ceratogonia (3 espèces) et Dichecephala (11 espèces) ont une répartition sud et est africaine.
Les Pegylini avec 4 genres et 37 espèces sont endémiques au continent africain. Le genre Pegylis (32 espèces) a, sans doute, son centre d’origine en Afrique orientale avec 23 espèces (72% des espèces). De là, il s’étend en Afrique australe (6 espèces) et en Afrique centrale (5 espèces). Sa limite occidentale est le Tchad et il est donc absent d’Afrique occidentale. Le plus grand nombre d’espèces se trouve en Tanzanie (12 espèces) et au Kenya (7 espèces). Le genre Hypopholis (3 espèces) présente une répartition discontinue avec deux espèces en Afrique australe et une espèce le long du Golfe de Guinée (de la Guinée à la RDC). Le taxon uelensis, de cette région, pourrait être séparé, par de nombreux caractères différentiels, des deux taxons d’Afrique australe et inclus dans un nouveau genre. Les deux genres Stenopegylis (Malawi) et Eupegylis (Afrique centrale) sont monospécifiques.
Les Leucopholini présentent plus de genres en région afrotropicale (15) qu’en région orientale (12) ou paléarctique (8). Les Leucopholini sont particuliers aux régions tropicales et ne se retrouvent que dans cette zone en région afrotropicale avec 64 espèces. Seul le genre Eulepida (20 espèces) se retrouve dans les quatre sous-régions, avec toutefois un plus grand nombre d’espèces en sous-région orientale (9 espèces). Son centre d’origine est, sans doute, cette sous-région, avec une progression en Afrique australe (5 espèces), en Afrique centrale (3 espèces), puis de là en Afrique occidentale (3 espèces). Ce genre est absent d’Afrique du Sud, de Namibie et du Botswana. Il n’est aussi pas représenté dans la zone du Sahel ni dans la Corne de l’Afrique. Quatre genres sont endémiques à la sous-région orientale : Brachylepis (2 espèces), Cochliotis (3 espèces), Lepidomela (2 espèces) Kenyalepis (1 espèce) et Tanzanilepis (1 espèce). Neuf genres sont présents en Afrique orientale, 7 en Afrique centrale, 4 en Afrique australe et 4 en Afrique occidentale.
Les Melolonthini avec 4 genres et 6 espèces comportent trois genres monospécifiques : Cochliotodes, Engistanoxia et Hoplosternodes. Le genre Ramilia (3 espèces) est avant tout présent en Afrique centrale avec une incursion en Afrique occidentale (Ghana). La progression de la tribu s’est faite depuis l’Est africain jusqu’en Afrique centrale. La tribu n’est pas connue d’Afrique australe. Si ce n’est pour le genre Ramilia, les espèces sont peu représentées dans les collections.
Les Rhizotrogini, trèe peu représentés dans la région afrotropicale, comprennent le genre Aethiaratrogus avec 1 espèce en Ethiopie, 2 espèces au Yémen et le genre Holotrichia avec 3 espèces (Sénégal, Afrique centrale).
Les Schizonychini (non compris dans cette étude), avec 39 genres et 466 espèces, représentent la majeure partie de la faune melolonthienne de la région afrotropicale. Le genre Schizonycha comprend à lui seul 349 espèces (75% du nombre total des espèces afrotropicales). Les genres monospécifiques sont au nombre de 18. Le genre Anartioschiza, avec 18 espèces, se trouve en Afrique centrale. Vingt-sept genres (dont 18 endémiques) sont présents en Afrique orientale. Par contre, la région occidentale, avec 4 genres, est pauvrement représentée.
La région afrotropicale, bloc séparé de l’ancien Gondwana, à partir d’un ancien fonds composé de Diplotaxini, Leucopholini, Melolonthini et Prérhizotrogini, a développé une faune originale mais moins diversifiée qu’en région orientale et dont les principales composantes sont les Pegylini, groupe-frère des Leucopholini et les Schizonychini descendants d’une branche des Prérhizotrogini. Après le rétablissement d’un contact avec la région paléarctique, par le biais de la Péninsule arabique, ces mêmes Schizonychini ont progressé jusqu’en région orientale. Les Leucopholini ont profité des zones de forêt pour se propager. Par contre, les Melolonthini, plus récemment arrivés, se sont trouvés bloqués dans des niches sans possibilité de grande expansion. Les grands absents de cette faune sont les Rhizotrogini très nombreux en régions paléarctique et néarctique et les Enariini, endémiques malgaches.